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La pénibilité au travail n’est pas un concept

pénibilité au travail

La pénibilité au travail fait parler d’elle depuis des décennies. Bien que le terme fût mal vu par Emmanuel Macron pendant la présidentielle, le compte pénibilité est un sérieux atout. Il tient compte de la dureté du travail des salariés. Il concerne tous les facteurs de risques professionnels touchant les travailleurs. Les risques sont susceptibles de laisser des traces durables et irréversibles pour la santé.

  • Alors, pénibilité au travail vous concerne t-elle ?

Qu’est-ce que la pénibilité au travail ?

On parle souvent de pénibilité au travail, mais savons-nous réellement de quoi il en retourne ? Le Code du travail explique clairement que des contraintes physiques marquées, un environnement agressif, ou des rythmes de travail particulièrement éprouvants sont considérés comme des facteurs de pénibilité. L’appréciation est toutefois laissée à la charge du corps médical. Ce dernier doit établir la possibilité pour le salarié de partir à la retraite à 60 ans. Cela se justifie notamment pour cause d’incapacité de travail supérieure à 10%.

La notion de pénibilité au travail peut s’évaluer en tenant compte :

des gestes liés à l’activité et aux efforts physiques (travail à la chaîne, port de charges lourdes, etc.) et de la souffrance physique ou psychique du salarié.

La mise en place d’un compte pénibilité

En 2015, le gouvernement de François Hollande dévoile donc le compte personnel de prévention de la pénibilité (C3P). Il ouvre droit à un point de retraite par trimestre d’exposition (avec un plafond de 1000 points). Le but d’une telle opération est avant tout de permettre aux travailleurs soumis à des facteurs de pénibilité de :

  • partir en retraite plus tôt en bénéficiant de trimestres (10 points = 1 trimestre) ;
  • alléger le temps de travail en maintenant la rémunération initiale ;
  • suivre une formation pour se réinsérer dans un travail moins pénible * (les 20 premiers points doivent d’ailleurs être obligatoirement réservés à la formation, sauf à partir de 52 ans).

* L’institut statistique du Ministère du Travail (DARES) a publié les 15 métiers les plus favorables au bien-être au travail. De l’ingénieur en informatique à la secrétaire de direction, en passant par l’employé de maison, le cadre de banque ou le coiffeur, découvrez les meilleures activités pour vous réinsérer professionnellement !

Plus d’explications sur le compte pénibilité

Le fonctionnement du compte pénibilité est simple : les salariés exposés aux travaux pénibles cumulent des points, qui peuvent ensuite être transformés pour valider des trimestres et partir en retraite plus tôt que l’âge légal, fixé à 62 ans depuis la réforme en 2010. Chaque travailleur soumis à un facteur de pénibilité gagne un point par trimestre d’exposition, soit 4 par an (en cas d’exposition à plusieurs facteurs en même temps, ce chiffre est doublé). Au bout de 10 points acquis sur le compte pénibilité, il bénéficie de l’abaissement d’un trimestre.

  • À noter : le salarié ne peut transformer que 80 points (soit 8 trimestres). Il pourra donc partir au plus tôt à 60 ans.

Les différents facteurs de pénibilité au travail

Successivement pris en compte par les lois des gouvernements Sarkozy (2010) et Hollande (2013), les facteurs de pénibilité peuvent impliquer :

  • le port de charges lourdes ;
  • une posture pénible qui implique une position forcée des articulations ;
  • les vibrations mécaniques (marteau-piqueur par exemple) ;
  • les températures extrêmes ;
  • le travail de nuit ;
  • la répétition intensive d’une tâche ;
  • le bruit ;
  • les agents chimiques dangereux (mais aussi la poussière et la fumée) ;
  • le travail en milieu supérieur à la pression atmosphérique (travaux pétroliers, percement de tunnels, caisson hyperbare, travaux publics sous-marins, etc.) ;
  • le travail en équipes successives alternantes.

En tout, ce sont 10 facteurs de pénibilité qui peuvent motiver la médecine du travail à déclarer un salarié comme soumis à une activité pénible (plusieurs facteurs peuvent bien entendu se combiner).

L’entreprise face à ses obligations légales

Comme toujours, l’entreprise n’échappe pas à ses obligations quand il s’agit de protéger la santé des salariés. C’est pourquoi le Code du travail prévoit une obligation de prévention de la pénibilité au travail, en accord avec l’obligation générale de sécurité qui incombe à l’employeur.

Négociation avec les salariés

Dans le cadre de la loi de 2010, toute entreprise qui expose ses salariés à des facteurs de risques professionnels* doit négocier des accords ou des plans d’action pour prévenir la pénibilité au travail.

*Depuis le 1er octobre 2017, le Code du travail fait référence aux facteurs de risques professionnels, et n’utilise plus le terme “pénibilité”.

Implication du CSE (à partir de 50 salariés)

Chaque année, l’employeur doit transmettre au Comité social et économique (CSE) – avant, au Comité d’Hygiène, de Sécurité et des Conditions de Travail (CHSCT) – un bilan des actions menées, visant à réduire la pénibilité au travail. Il doit également fournir un programme annuel de prévention des risques professionnels, avec toutes les mesures préventives envisagées.

Le document unique

La proportion de salariés exposés, et les données collectives utiles à l’évaluation des expositions aux facteurs de pénibilité doivent être annexées au document unique (DUERP).

Ce qui change en 2018

Les ordonnances Macron ont quelque peu bousculé le paysage professionnel, et le compte personnel de prévention de pénibilité (C3P) n’y a pas échappé. Désormais appelé C2P (compte personnel de prévention), il prend en compte seulement 6 facteurs de pénibilité (au lieu de 10 dans l’ancien dispositif). La suppression des 4 autres facteurs de pénibilité concerne les postures pénibles, les vibrations mécaniques, les risques chimiques et le port de charges lourdes. Ils ne font en conséquence plus l’objet d’une déclaration par l’employeur, et ne peuvent plus être pris en compte dans le cumul des points. Ils sont en revanche reconnus comme causes de maladie professionnelle, ou de taux d’incapacité permanente de plus de 10%.

Cependant, l’employeur doit toujours déclarer chaque année les 6 autres facteurs de pénibilité frappant les travailleurs, à partir d’un certain seuil pour le travail :

  • de nuit : 1 heure de travail entre minuit et 5h, sur plus de 120 nuits/an ;
  • en milieu hyperbare : 1200 hectopascals, sur plus de 60 interventions par an;
  • en équipes successives (5×8, 3×8) : 1 heure de travail entre minuit et 5h, sur plus de 50 nuits/an;
  • répétitif (répétition d’un même geste à fréquence élevée) : 30 actions techniques par minute, sur plus de 900 heures/an ;
  • soumis aux températures extrêmes : -5° C ou + 30° C, sur plus de 900 heures/an ;
  • exposé au bruit : 81 décibels pendant 8 heures, sur plus de 600 heures/an.

Cette réforme du compte de pénibilité concerne tous les salariés. Il peut s’agir d’un CDI ou d’un CDD de plus d’un mois. Et cela quelle que soit la durée du travail.

À savoir :

C’est désormais la branche accidents du travail de la sécurité sociale qui finance le C2P. Il n’y a plus de demande de cotisations de base (0,01% des rémunérations de l’entreprise), ni de cotisations additionnelles de la part des employeurs.

Pour conclure sur la pénibilité au travail

Malgré la réforme du Code du travail, le compte pénibilité n’a pas subi de réelles modifications. Aucune des évolutions ne portent préjudice aux salariés. Ce sont les déclarations de l’employeur qui permettent aux travailleurs de bénéficier automatiquement du cumul des points, calculés par la caisse d’assurance vieillesse.

 – En résumé, si vous êtes concerné par la pénibilité au travail, vous n’avez rien à faire : votre situation sera prise en compte sans que vous ayez à intervenir !

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Auteur de l'article

FABRICE ALLEGOET

Fabrice ALLEGOET est un formateur en droit du travail. Il est formé et rompu aux formations SSCT. Il a formé des dizaines d'apprenants et dispose d'une expérience particulière dans les domaines des risques psychosociaux et des pathologies psychiques. Il est aussi coach en développement personnel depuis 2015.

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